Bien sûr, il y a « mes biens », je paye ou j’ai payé pour les avoir. J’ai dépensé de l’énergie, j’ai parfois sué et longtemps désiré pour les avoir. Parfois, ils me sont arrivés comme un vent frais sur mon visage, parfois comme un courant d’air qui fait claquer les portes d’une maison.
Mais un jour ou l’autre,ces biens disparaissent.
Alors ! Alors ! Je m’y attache pardi! Ils me servent, j’en ai besoin, enfin, plus ou moins.
Pour une bonne part je pourraism’en passer, non ?
Tous ces biens qui remplissent ma vie, sont-ils la vie ou ma vie ?
Alors ! Alors ! Il y a la vie, tout autour et celle « tout en moi ».
Celle « tout en moi » me chauffe, me porte, me souffle, me siffle, m’entraîne et parfois me fait suer, surtout quand je ne la comprends pas, etparfois m’émerveille. Il y a un temps, j’auraisaimé la contrôler, aujourd’hui je sais que c’est impossible.
Ah ! Tu peux toi ! Bien si tu le crois !
La vie tout autour est un terrain d’aventure, un jeu de rencontres et de combatsparfois, un espace ou je peux acquérir, échanger, regarder et entendre ou toucher.
Entre mes biens et la vie se dressent mes habitudes :l’habitude d’avoir ou d’utiliser ceci ou cela, l’habitude de m’identifier à telle ou telle perception, l’habitude de faire ou dire, l’habitude d’être comme cela et pas comme ça… Il y a ce que je reconnais autour de moi comme « tout « en moi ».
Bien sûr cela peut donner l’impression que cet ensemble nous appartient, que la vie t’appartient, non ?
Ah bon ? Vraiment ?
S’il y avait appartenance…
…est-ce que c’est la vie qui nous appartient ou nous qui lui appartenons ?
Appartenance ! Quel drôle de mot. Quand un objet m’appartient je peux en faire ce que je veux. C’est bien cela ? Je peux donc en bénéficier, en faire bénéficier qui veut, m’en occuper comme le délaisser, en prendre soin comme le détruire, « l’abîmer » ou l’encenser…
Ma vie, comme parfois je l’ai appelée.
Ok ! Ok ! Quand je parle de « ma vie », je parle de celle que je connais, celle qui m’accompagne tous les jours et dont j’ai conscience en partie. Un peu comme ma compagne, d’ailleurs. Alors ma vie, oui je peux m’en occuper, en bénéficier ou en faire bénéficier les autres, la délaisser, en prendre soin comme la détruire, « l’abîmer » ou l’encenser. Ma compagne aussi, d’ailleurs, mais si je la détruis, elle va râler, cela va se savoir. La vie elle, elle ne râle pas vraiment quand on la maltraite, on ne l’entend pas, enfin, on fait semblant, peut-être. On essaye d’en faire ce qu’on en veut. C’est plus facile qu’avec sa compagne ou son compagnon, non ?
Pourtant elle peut nous quitter à tout moment. Oui ! Oui ! La compagne, le compagnon bien sûr aussi, mais la vie de même, non ?
Eh oui ! Comme ça, sans crier gare.
Et pourtant il nous sert sans rien nous demander vraiment, ce vivant qui nous traverse. Il nous laisse le chercher en nous attendanttranquillement tapie« tout en nous ». Même après le retour de notre corps à la terre, corps qui va nourrir les petits vers blancs, ce vivant reste la vie – merci Jacques. Elle nous serre de près à chacun de nos pas et quand on la regarde les yeux lavés de jugements, de peurs, de manques et d’oublis, on peut s’apercevoir de sa douceur et de sa bienveillance. Quand on la regarde les yeux dégagés de volontés et de contrôles, elle apparaît immensément disponible, ouverte, grande et petite à la fois.
Que serais-je, sans elle ?
Vide ? Mais le vide fait partie de la vie – alors, merci !
Mort ? Mais la mort fait partie de la vie – alors, merci !
Une ombre ? Le soleil appelle l’ombre –alors, merci !
Rien ? Tout se fait à partir de rien –alors, merci !
Simplement moi ? Simplement elle ? Quelle différence ?
Différent de toi ? Merci la multitude du rien !
Et si je me disais – merci à moi-même – merci à toi ?
Peut-être que la vie me dirait merci.